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Rétrospective 2021 et projections pour 2022
Qu’attendre de cette nouvelle année pour l’industrie des crypto-actifs ?
L’année 2021 s’est révélée spéciale pour l’industrie des actifs numériques à bien des égards. Si les nouvelles vagues dans la crise sanitaire ont continué d’affecter l’économie dans son ensemble, le secteur des crypto-actifs a su mener sa barque et naviguer entre plusieurs phénomènes déjà amorcés en 2020 : structuration, institutionnalisation, démocratisation et réglementation.
Dans ce document, l’Adan propose de revenir sur les événements marquants de l’année 2021 pour le secteur, et partage sa vision des grands enjeux et des échéances qui attendent les acteurs en 2022.
2021 : Une année marquante pour l’industrie
I – Une institutionnalisation exponentielle du marché des crypto-actifs
A l’issue de l’année 2021, l’univers des crypto-actifs intéresse et attire toujours plus d’acteurs non-natifs de cet écosystème, qui en perçoivent de mieux en mieux les opportunités. L’intérêt suscité par les actifs numériques auprès du grand public s’est encore apprécié : bitcoin, DeFi, NFT… tous ces mots sont désormais rentrés dans le quotidien de nombreux utilisateurs, consommateurs et institutionnels.
Davantage de grandes entreprises se rapprochent des crypto-actifs :
- Les entreprises n’hésitent plus à placer leur trésorerie dans le bitcoin :
- Après les nombreuses sorties d’Elon Musk sur le bitcoin, Tesla annonce un investissement d’1,5 milliards de dollars dans « l’or numérique ».
- Microstrategy investit tout au long de l’année dans le bitcoin jusqu’à en détenir environ 124 391 unités en décembre 2021.
- La DeFi se prépare à des imbrications avec les acteurs institutionnels :
- Aave lance Arc, la plateforme de prêts/emprunts décentralisés dédiée aux acteurs institutionnels.
- La Société Générale et Maker DAO concluent une collaboration historique appelée “security tokens refinancing”.
- Les acteurs de la finance ancrent davantage les crypto-actifs dans leur stratégie :
- Visa acquiert un Cryptopunk (#7610).
- Paypal lance son service de paiement en bitcoins.
- Société générale annonce émettre son premier produit structuré sur une blockchain publique.
- Lydia s’associe à Bitpanda pour offrir un service de trading de crypto-actifs à ses utilisateurs.
- Qonto autorise ses clients à investir dans les crypto-actifs.
- Les marques de sport mènent une course effrénée aux marchés des NFT et des métavers :
- Nike annonce le rachat de RTFKT, une start-up spécialisée dans la création de baskets virtuelles sous forme de NFT.
- Adidas lance sa collection de NFT “Into the Metaverse”.
- Les réseaux sociaux veulent inscrire les crypto-actifs dans leur business model :
- Depuis septembre, Twitter permet d’effectuer des dons en bitcoins et souhaite proposer à terme un service pour les NFT.
- Facebook se renomme “Meta” et prévoit dans les prochains mois/années de lancer son projet de métavers.
- Le luxe entend aussi se faire une place dans l’industrie crypto :
- LVMH s’est associé à Cartier et Prada pour le déploiement d’Aura Blockchain Consortium, la première blockchain de luxe internationale.
- Arianee s’associe à IBM pour fournir des passeports numériques reposant sur la technologie blockchain dans le secteur de la mode et du luxe.
Les banques centrales intensifient leurs expérimentations…
- La Chine annonce le lancement de son yuan numérique et procède à ses premières expérimentations dans différentes régions.
- En juillet, le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) lance officiellement une phase d’investigation de deux ans sur l’émission d’un euro numérique.
- La Réserve fédérale américaine s’intéresse timidement à l’émission d’un dollar numérique.
- La Banque de France, la Banque nationale suisse et le Pôle d’innovation de la Banque des règlements internationaux (BRI) s’unissent pour lancer le projet Jura, une expérimentation pour l’utilisation d‘une monnaie numérique de banque centrale (MNBC) dans un contexte transfrontière.
- La Banque de France poursuit ses expérimentations sur les MNBC en consortium avec d’autres acteurs de la finance.
…tandis que les acteurs privés déploient des crypto-actifs collatéralisés à différents types d’actifs :
- En 2021, les stablecoins d’initiatives privées font l’objet d’une utilisation de plus en plus intense. Portée par l’USDT (de Tether), l’USD Coin (de Circle), le Binance USD (de Binance), le DAI (de Maker) et une myriade d’autres actifs, la capitalisation totale du marché atteint les 150 milliards de dollars à la fin de l’année. A titre de comparaison, ce marché ne représentait qu’un peu moins de 25 milliards de dollars de capitalisation en décembre 2020.
- Coinhouse et Nomadic Labs s’associent au groupe Casino et à Société Générale pour le lancement du Lugh (EURL), le premier stablecoin français adossé à l’euro.
- Tether annonce le lancement de l’EURT, un stablecoin adossé à l’euro et disponible sur la plateforme Bitstamp.
- Le RAI de Reflexer est émis sur le Mainnet d’Ethreum, ce stablecoin décentralisé est uniquement collatéralisé à l’ether et est totalement indépendant de toute monnaie à cours légal.
- Le stablecoin de l’écosystème Terra Luna s’est progressivement imposé parmi les leaders dans le domaine, passant de 150 millions à près de 9 milliards de dollars de capitalisation entre janvier et décembre 2021.
- Le projet Libra de Meta, nouvellement appelé Diem, ne semble pas avoir grandement avancé durant l’année.
II – La construction progressive du cadre réglementaire applicable aux crypto-actifs
2021 est marquée par d’importantes avancées sur la réglementation des marchés des crypto-actifs dans le monde. Ces initiatives sont impulsées par la même volonté : trouver l’équilibre afin de garantir la protection des utilisateurs d’une part, sans entraver l’épanouissement de l’innovation d’autre part.
En France :
- 28 prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) sont désormais enregistrés auprès de l’AMF avec avis conforme de l’ACPR.
- Les exigences en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT) applicable aux PSAN se renforcent : le décret du 2 avril 2021 prévoit que les prestataires enregistrés ou agréés et les émetteurs de jetons ayant obtenu le visa AMF doivent réaliser l’identification de leurs clients à chaque opération.
- L’Assemblée nationale adopte définitivement le projet de loi de finances pour 2022. Trois dispositions, prônées par l’Adan, sont votées en faveur de la fiscalité des actifs numériques.
Côté Vieux continent :
- Les discussions avancent à petits pas concernant la proposition de Règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets). Si le 24 novembre, le Conseil de l’Union européenne a adopté sa position sur le texte, les discussions au Parlement européen s’éternisent, retardant d’autant le début du trilogue.
- Un accord a été trouvé entre le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne sur le texte du régime pilote pour les marchés de security tokens, permettant de lever les obstacles réglementaires à l’émission et la négociation d’instruments financiers sur les réseaux blockchain.
- La Commission européenne dévoile sa réforme du dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT). Ce paquet législatif est composé de quatre textes et tend notamment à instaurer la travel rule dans le secteur des crypto-actifs, et instituer une nouvelle autorité européenne de régulation dédiée à la LCB-FT (l’AMLA).
Hors de nos frontières :
- Depuis le 7 septembre 2021 et l’entrée en vigueur de la “Lei Bitcoin”, le bitcoin est devenu une monnaie légale au Salvador.
- L’interdiction du minage en Chine mène de très nombreux mineurs à l’exode vers d’autres Etats. Selon certaines sources, 20% des mineurs de Bitcoin dans le monde seraient restés en Chine (l’Empire du Milieu ayant pesé jusqu’à 65% de la puissance de calcul de Bitcoin).
- Le 15 novembre, les Etats-Unis conviennent d’un projet de loi bipartite qui comprend un nouveau cadre fiscal pour le secteur des crypto-actifs.
- Après avoir validé le premier fond indiciel sur bitcoin (ETF de la société Proshares), la SEC reporte ses décisions sur deux autres ETF basés directement sur le prix au comptant du bitcoin.
- Le Trésor américain rend un rapport sur les stablecoins mettant en exergue la nécessité d’instaurer un cadre réglementaire clair à leur égard.
- Le régulateur des marchés financiers, la SEC, s’intéresse aux protocoles de finance décentralisée :
- Le 3 août, Gary Gensler (Président de la SEC) explique que la priorité législative devrait se concentrer sur le commerce et le prêt de crypto-actifs et les plateformes DeFi.
- En septembre, la SEC ouvre une enquête à l’égard de la plateforme Uniswap afin de mieux comprendre la manière dont les utilisateurs utilisent l’AMM (automated market maker) et la qualification des actifs qu’elle propose. Pour rappel, Uniswap avait déjà retiré certains actifs de sa plateforme pour mieux se conformer aux exigences réglementaires.
III – La structuration continue du secteur, sur sa lancée de 2020
Le développement important du cadre réglementaire précédemment évoqué permet d’instaurer une confiance toujours plus forte envers le secteur des crypto-actifs. Ce niveau de confiance croissant mène à ce que plus de particuliers et d’institutionnels s’intéressent à ce marché. Ainsi, la structuration de l’industrie des crypto-actifs connaît une pente ascendante depuis plusieurs années avec un marché en constante évolution.
Le marché des crypto-actifs a connu une envolée sans précédent :
- En novembre 2021, le marché des crypto-actifs franchit le seuil record des 3000 milliards de dollars de capitalisation.
- Sur l’année, plus de 14 000 milliards de dollars de crypto-actifs sont échangés de par le monde (presque huit fois plus qu’en 2020).
- Une photographie de juin 2021 montre que 221 millions de personnes dans le monde possèdent des crypto-actifs, contre 106 millions au début du semestre.
- A l’international, les fonds de capital-investissement abondent le secteur crypto à hauteur de 30 milliards de dollars.
L’industrie française rentre dans la cour des grands :
- Le rapport d’enquête de l’Adan sur l’état des lieux de l’industrie des actifs numériques publié en mai 2021 révèle que 85,5 % des acteurs crypto interrogés souhaitent poursuivre leurs projets en France dans les prochaines années.
- La French Tech comptabilise deux licornes appartenant au secteur crypto :
- Ledger annonce avoir réalisé une levée de fonds de 380 millions de dollars. La société est valorisée à l’époque à 1,5 milliards de dollars.
- Sorare accomplit une levée de fonds de 680 millions de dollars. La société est valorisée à 4,3 milliards de dollars.
- Outre ces licornes, les levées de fonds par les acteurs français se multiplient : Paraswap, Kaiko, Sheeldmarket, etc.
- Binance annonce le lancement d’”Objectif Lune”, un investissement de 100 millions de dollars destiné à la recherche dans le secteur des actifs numériques en France.
- Certains acteurs dessinent les contours de la “crypto-banque” : Coinhouse avec son livret crypto, BitPanda avec son partenariat avec Lydia, Just Mining avec son service de prêt-emprunt sur crypto-actifs, Paymium avec son services d’achats récurrents de bitcoin, etc.
Le rythme et les moyens de la croissance de l’industrie américaine restent toujours sans commune mesure :
- Sur les 30 milliards de dollars investis dans l’industrie crypto, 7,2 (près du quart) proviennent de fonds américains.
- En juillet OpenSea annonce une levée de fonds de 100 millions de dollars. Cette tendance croissante ne semble pas s’affaiblir puisque le 4 janvier 2022, la plateforme de NFT dévoile une nouvelle levée de 300 millions de dollars.
- FTX effectue une levée de fonds de 900 millions de dollars. La plateforme d’échange de crypto-actifs était ainsi valorisée à 18 milliards de dollars.
- NYDIG, le courtier institutionnel en bitcoins, lève 1 milliard de dollars de financement : un nouveau record pour l’industrie.
IV – L’innovation sur le marché ne cesse de s’amplifier
L’année 2021 est aussi synonyme de la grande diversification de l’écosystème des crypto-actifs. Si en 2009, le bitcoin était le pionnier et le seul, il est désormais – avec d’autres actifs tels que l’ether – la clé de voûte d’une palette de plus en plus éclectique.
La croissance de la finance décentralisée (DeFi) s’est fortement accélérée :
- Le total des actifs placés sous gestion dans les protocoles de finance décentralisée est passé de 18 milliards de dollars en 2020 à environ 260 milliards de dollars en décembre 2021.
- L’accès à la DeFi se généralise : Coinbase lance un service de finance décentralisée (DeFi) avec Compound.
- L’expansion de la DeFi va malheureusement de pair avec la recrudescence des hacks dans le secteur de la DeFi : Polynetwork, Cream Finance, Badger DAO, etc.
- Le recours aux Layer 2 n’a cessé de croître en raison du manque de scalabilité de certaines blockchains d’infrastructure : Polygon, Arbitrum, Skale.
Les NFT sont rapidement adoptés par les acteurs traditionnels et le grand public :
- Le nombre de NFT émis ne cesse d’augmenter :
- Selon un rapport de Chainalysis, en 2021, les utilisateurs ont envoyé au moins 26,9 milliards de dollars de crypto-actifs à des jetons ERC-721 et ERC-1155.
- A la fin de l’année 2021, le marché du crypto-art est évalué à plus de 2 milliards de dollars.
- Des ventes records font la une :
- L’œuvre numérique « EVERYDAYS : THE FIRST 5000 DAYS » de l’artiste américain Beeple a été vendue 69,3 millions de dollars par la maison d’enchères Christie’s.
- Un cryptopunk (#7523) a été vendu 11,7 millions de dollars à New York chez Sotheby’s.
- Arianee lève 8 millions d’euros auprès de Bpifrance pour développer son produit autour des NFT et accompagner la transformation digitale de la mode et du luxe.
- Mais le marché des NFT crée aussi de nombreux différends : en décembre 2021, la marque Hermès a mis en garde un créateur de NFT pour des imitations de ses sacs Birkin.
- Pascal Boyart “PBOY” met en vente sa dernière fresque “The Underground Sistine Chapel” via 400 NFT mintés (émis) sur la blockchain Ethereum.
- Ownest s’associe à C-Discount pour la traçabilité de sa chaine logistique : chaque fois qu’un colis volumineux ou à forte valeur est commandé auprès de Cdiscount, ce dernier sera tracé sur la Blockchain via les trackers NFT de responsabilité.
Les métavers s’installent comme une révolution incontournable à long terme :
- Le projet métavers TheSandbox annonce une levée de fonds de 93 millions de dollars.
- L’entreprise française de jeu vidéo Atari s’est associée à Decentraland pour le lancement d’un casino dans le métavers.
- Le projet Axie Infinity s’est placé parmi les leaders dans le domaine avec plus de 2 millions d’utilisateurs par jour (un nombre qui ne cesse de croître).
- Le géant de l’internet chinois Baidu fait ses premières expériences dans le métavers en lançant son projet XiRang.
2022 : Des échéances décisives pour le secteur
I – Une année politique française charnière pour les crypto-actifs
- A l’occasion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, qui a débuté ce 1er janvier 2022, les enjeux de souveraineté et compétitivité numériques seront au coeur de l’agenda. L’Adan continuera de porter la voix de l’industrie pour ancrer les crypto-actifs comme pilier de la stratégie européenne.
- Les élections présidentielles françaises présentent d’importants enjeux pour l’avenir et le développement croissant de l’industrie française des actifs numériques. Tout au long de ces derniers mois, l’Adan oeuvre afin d’inscrire le secteur des actifs numériques dans les débats de campagne présidentielle, et éveiller les consciences sur ce nouveau moteur de l’économie numérique. L’objectif réside à élever le développement de l’industrie française comme une opportunité pour la France, à intégrer dans la feuille de route du prochain quinquennat.
- Dernier temps fort d’un premier semestre riche, les élections législatives françaises devraient mener à un certain renouvellement de l’hémicycle, et possiblement de ses “crypto-députés”. L’Adan devra sensibiliser les nouveaux élus aux problématiques des entreprises des crypto-actifs en France.
II – Une adoption des crypto-actifs de plus en plus démocratisée en France
- L’adoption croissante des crypto-actifs ne devrait pas s’essouffler en 2022 : si elle s’établit à près de 7 % en 2021, la proportion de citoyens français détenant des crypto-actifs devrait continuer à s’apprécier.
- L’acquisition de crypto-actifs pourrait être stimulée par la conjoncture économique : incertitudes persistantes liées à la COVID 19, retour d’une inflation non transitoire élevée, interrogations sur l’inflexion des politiques monétaires.
- En parallèle, s’ils restent encore perçus comme des actifs de diversification, les crypto-actifs pourraient néanmoins devenir de plus en plus corrélés aux autres classes d’actifs.
- En matière de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme, l’évolution des risques BC-FT à la baisse devrait se poursuivre en 2021, notamment en raison de la mise en conformité croissante à la LCB-FT des entreprises proposant des services sur crypto-actifs. Entre 2020 et 2021, la proportion de transactions en crypto-actifs illicites est passée de 0,34% à 0,15% de la totalité des échanges internationaux. Une telle dynamique rassurera encore les investisseurs et les autorités.
- Cependant, d’autres menaces – principalement liées à la fraude et à la cybercriminalité – pourraient malmener la démocratisation des crypto-actifs.
- C’est pourquoi l’éducation à destination des utilisateurs, notamment les néo-investisseurs, semble encore à parfaire, tant en matière de bonnes pratiques que de connaissances générales des crypto-actifs, encore trop biaisées par un certain nombre d’idées préconçues tenaces (pyramide de Ponzi, assimilation des crypto-actifs au blanchiment et au terrorisme ou à une catastrophe environnementale, etc.). La mission pédagogique de l’Adan demeura, en 2022, un axe fondamental de son action.
III – La structuration graduelle de l’écosystème européen des crypto-actifs
Pour rester crédible et attractive, l’industrie devra se développer en tenant compte des grands enjeux qui se posent à elle :
- La mise au banc des entreprises insuffisamment vertueuses – matérialisées par le détournement des fonds des utilisateurs, leur non-conformité aux dispositifs nationaux, les abus de marché (notamment les délits d’initié), la protection lacunaire des utilisateurs et pratiques commerciales déloyales – devraient s’accentuer, tant aux niveaux des utilisateurs que des autorités.
- Afin de garantir la confiance dans le secteur et continuer de proposer des services innovants, les acteurs devront anticiper et se préparer à la nouvelle vague réglementaire à venir (notamment le paquet européen en matière de finance numérique et celui sur la LCB-FT).
- Il conviendra, pour les entreprises, de parachever la gestion et la prévention de certains risques déjà pris en compte depuis plusieurs années, notamment en matière de LCB-FT.
- Mais cette nouvelle année nécessitera aussi d’appréhender et de maîtriser les nouveaux risques – souvent de nature technologique – qui émergent dans le secteur des crypto-actifs, notamment dans le monde de la DeFi (hacks de smart contracts, attaques d’oracle, rug pull, attaque de l’interface web, risques liés à l’actif, etc.)
- Les enjeux liés à la transition écologique et la durabilité des crypto-actifs seront aussi un sujet d’ampleur pour la pérennité du marché des actifs numériques : la pression institutionnelle accrue (e.g audition du Congrès américain) s’ajoute à celle de la société civile, et les initiatives de certains régulateurs sur les activités de minage (autorisations et interdictions) pourraient en inspirer d’autres.
- Les propositions de valeurs offertes par les différentes applications décentralisées (y.c DeFi et unhosted wallet) devront être consacrées pour ne pas être entravées par un cadre réglementaire inadapté ou inapplicable.
La réglementation française orientera la structuration des parties prenantes aux marchés de crypto-actifs :
- Il n’est pas exclu que 2022 accueille une nouvelle évolution du régime PSAN : les autorités semblent en effet s’intéresser de plus en plus aux plateformes d’échange de NFT et à certains services proposés par les projets de finance décentralisée (DeFi).
- De nouveaux prestataires devraient rejoindre la liste des 28 PSAN enregistrés à ce jour.
- Si l’agrément français s’inscrit comme un outil de transition accélérée vers le régime européen, le premier PSAN agréé pourrait enfin être consacré.
- Dans tous les cas, les acteurs français devraient commencer à se préparer à l’arrivée de cet encadrement supranational. Néanmoins, 2022 n’actera pas encore la fin du régime PSAN.
- Enfin, avec le renforcement des équipes des autorités de tutelle des PSAN acté grâce au Projet de Loi de Finance 2022, et la création d’une task force nationale de lutte contre les arnaques financières en décembre 2021, nous devrions assister à une meilleure supervision du secteur et une pression accrue à l’égard de la publicité illégale – direct ou indirecte (e.g. passée via un influenceur), laissant espérer la fin de la concurrence déloyale entre les acteurs.
La compétitivité de l’industrie Outre-Atlantique restera sans commune mesure :
- Les Etats-Unis pourraient creuser leur avance en matière d’investissement. En 2021, les fonds de capital-risque américains ont alloué 7,2 milliards de dollars au secteur des crypto-actifs.
- De nouvelles entreprises majeures de l’industrie des crypto-actifs pourraient – dans la continuité de l’IPO de Coinbase – être introduites en bourse.
- L’hégémonie des stablecoins dollar se confirmera, encouragés d’une part par certains acteurs politiques (comme Ritchie Torres), d’autre part non-découragés par une Réserve fédérale n’ayant pas fait du dollar numérique une priorité. Des annonces, comme celle de Paypal, stimuleront certainement la concurrence.
IV – Les futures fondations de l’environnement européen des crypto-actifs : de l’esquisse au tableau
La clarification et l’harmonisation de la réglementation européenne devrait établir les conditions de confiance utiles au développement de l’innovation :
- Les débats autour de la proposition de règlement MiCA au Parlement européen, qui se sont enlisés tout au long de 2021, empêchent le lancement du trilogue européen dont l’industrie domestique espère qu’il pourra débuter sous Présidence française du Conseil de l’UE.
- Dans le cadre de MiCA, les perspectives pour l’écosystème des stablecoins euro et de la finance décentralisée pourraient se révéler plus ou moins dégradées.
- Un durcissement du projet de réforme européenne en matière de LCB-FT serait prévisible, a minima probable, car influencé par la mise à jour stricte des lignes directrices du GAFI le 28 octobre 2021.
- A la suite de l’adoption du régime pilote pour les marchés de security tokens prévue au printemps, les premières expérimentations pourraient se matérialiser dès le second semestre.
En marge des sujets de réglementation, le paysage institutionnel devraient confirmer sa (lente) mutation :
- Les investigations de la Banque centrale européenne (BCE) sur l’émission d’un euro numérique, amorcées en octobre 2021, se poursuivront tout au long de l’année.
- En parallèle, les interrogations et attentions portées par le système bancaire quant à la transition vers cet euro numérique ne devraient cesser de croître.
- La Banque de France continuera de mener ses propres expérimentations en collaboration avec d’autres acteurs de la finance traditionnelle et du secteur des crypto-actifs.
En parallèle des travaux européens, l’institutionnalisation au sein des autres grandes régions du monde se poursuivra selon leurs priorités propres :
- A la suite des lignes directrices publiées en octobre par le GAFI, plusieurs États – tels que la Corée du Nord et l’Estonie récemment – ont déjà indiqué vouloir s’en inspirer et pourraient mener le front en vue d’adopter des mesures drastiques à l’égard des protocoles de finance décentralisée.
- La fronde de l’Etat chinois envers l’acquisition de crypto-actifs et le minage pourrait encore s’intensifier, au fur et à mesure de l’adoption florissante du bitcoin et du déploiement du yuan numérique.
- 2022 devrait être une année décisive pour ce e-yuan, notamment à l’aune des Jeux Olympiques d’hiver.
- D’autres banques centrales, comme au Mexique, pourraient accélérer sur leurs projets de monnaie numérique (MNBC).
- D’autres Etats (notamment d’Amérique du Sud ou d’Afrique) pourraient légiférer à l’instar du Salvador afin d’adopter le bitcoin comme monnaie à cours légal.
- Les Etats-Unis, qui s’intéressent de plus en plus aux stablecoins et à la finance décentralisée, pourraient étudier l’idée d’émettre un cadre réglementaire spécifique pour le secteur des crypto-actifs.
V – L’interconnexion accrue des entreprises des crypto-actifs et des autres agents économiques
“Bancarisation” de l’écosystème français des crypto-actifs ? 2022 pourrait signer le baptême du feu pour les premiers établissements de crédit :
- La première offre réelle et assumée, à destination de l’écosystème crypto, de services bancaires (comptes, crédit, paiement, financement) devrait être lancée.
- De nouvelles prestations bancaires liées aux crypto-actifs devraient voir le jour, par exemple en les intégrant à des produits d’épargne ou d’investissement, aux portefeuilles de certains clients, en rendant du conseil à leur clientèle, etc.
- Les premières acquisitions de start-ups spécialisées dans le secteur pourraient venir aider ces ambitions à l’instar de PayPal qui, le 8 mars 2021, a racheté le fournisseur israélien de sécurité des actifs numériques Curv. Cette collaboration permettra à Paypal de développer son propre stablecoin.
Les acteurs traditionnels saisiront les opportunités business liées à l’accompagnement des entreprises crypto et à l’innovation de leurs activités au moyen des crypto-actifs :
- L’instauration du régime pilote européen pour les marchés de security tokens devraient galvaniser des partenariats cross-industries (notamment avec les opérateurs de MTF et les dépositaires centraux de titres).
- Les travaux menés par les assureurs pour couvrir les risques de responsabilité civile professionnelle des prestataires de services sur crypto-actifs seront poursuivis. Une offre assurantielle spécifique pour ces acteurs pourrait voir le jour.
- La nouvelle année pourrait également voir l’émergence de nouveaux fonds français investissant dans les entreprises crypto, y compris en jetons.
- Dans la lignée de certains précurseurs (e.g Airbnb), l’acceptation des crypto-actifs comme moyens de paiement de services traditionnels pourraient se diffuser.
- Les marques et le monde du commerce de façon générale s’intéresseront de plus en plus au développement des NFT et des métavers, identifiés comme des opportunités de renforcer leur identité, leur communauté, et d’approfondir l’expérience numérique de leurs clients. La concurrence entre les GAFAM pour être le leader dans le rareté numérique et les mondes virtuels pourraient s’intensifier considérablement. Les premiers signes de compétition entre ces acteurs se sont déjà matérialisés.
- Au sein de tout type d’industrie, de nouvelles collaborations pourraient naître entre acteurs crypto et acteurs en place, à l’instar de celle entre Ubisoft et Sorare en 2021 dans le secteur du jeu vidéo. Ces synergies – entre les entreprises établies et leurs challengers – pourraient également concerner le secteur de l’art, celui du sport, du divertissement, de l’immobilier et plus encore.
Des avancées notables des acteurs crypto sur le terrain de la banque-finance traditionnelle
- De nouvelles “crypto-banques” pourraient faire leur apparition en proposant à leurs clients des services sur crypto-actifs proches de prestations traditionnelles.
- Les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) pourraient aller à la conquête d’autres statuts, comme celui d’émetteur de monnaie électronique, ou de prestataire de services de paiement.
- De nouveaux ETF sur le bitcoin, notamment avec exposition directe au prix au comptant du bitcoin, pourraient être lancés.
- La démultiplication et la résilience croissante des acteurs de la finance décentralisée (DeFi) devraient attirer de plus en plus la clientèle des services centralisés équivalents.
VI – Le potentiel d’innovation et toutes ses promesses
En 2022, le progrès technique dans le secteur des crypto-actifs devrait continuer à impulser la crypto en un secteur majeur d’innovation.
Les grandes révolutions de 2021 ne seront pas un simple effet de mode :
- Le développement des services Web 3 se poursuivra, des mises à jour importantes sont prévues sur de nombreux protocoles de finance décentralisée, notamment sur Aave. La mise en place de services dédiés aux institutionnels se développera assurément.
- Les métavers continueront leur folle ascension initiée en 2021, de nombreuses sociétés – à l’instar de Meta – pourraient procéder à une transition vers un monde virtuel.
- Le marché des NFT aura encore vocation à s’étendre autour d’applications concrètes dans les domaines du divertissement, du jeu vidéo, de l’art, du luxe. Le recours aux NFT physiques (représentation d’un objet physique) pourrait devenir plus récurrent.
Les efforts de perfectionnement des infrastructures ne seront pas vain :
- Des améliorations sur le réseau Bitcoin sont prévues. Le protocole de seconde voire de troisième couche RGB – qui permettra l’émission de nouveaux smart contracts scalables et protecteurs de la vie privée – pourrait être définitivement déployé. Le lancement de la V2 de Stratum, l’un des plus gros pools de minage sur le réseau Bitcoin, est aussi à prévoir. L’objectif de cette nouvelle version de Stratum est d’améliorer le transfert de données, de réduire le coût des infrastructures physiques pour les opérations de minage et d’améliorer la sécurité du réseau. Enfin, des propositions d’améliorations du réseau Bitcoin sont déjà à l’étude :
- Le BIP 118, dépendant de la mise à jour Taproot, qui créera un nouveau type de clés plus adaptées aux protocoles off-chain.
- Le BIP 119, qui permettra d’encadrer la manière dont un bitcoin sera dépensé.
- Des améliorations sur le réseau Ethereum sont aussi programmées. Le changement de protocole de consensus sur Ethereum (“The Merge”) devrait apporter des solutions aux deux grands écueils du réseau, en améliorant la scalabilité du réseau et en réduisant le coût énergétique du protocole. Cette mise à jour historique du réseau est cependant loin d’être actée, il conviendra de rester vigilant face aux retards de mise en œuvre et aux difficultés inattendues que pourrait rencontrer l’écosystème à la suite de cette transition.
- D’autres incrémentations techniques sont à prévoir :
- Les problématiques de scalabilité des différents réseaux seront davantage atténuées via des sidechain, Layer 2 et intégration du ZK-proof (notamment via les protocoles Starksync et Starknet).
- Les nouvelles blockchain d’infrastructures (Polkadot, Solana, Terra, Avalanche, etc.) pourraient continuer à proposer une alternative à Ethereum et favoriser l’innovation dans le secteur.
- L’interopérabilité des blockchain d’infrastructures devrait faire l’objet de nouvelles améliorations grâce notamment aux ponts cross-chains et aux systèmes d’atomic swaps entre différentes blockchains.
- Le recours aux assurances décentralisées sera – d’après plusieurs estimations – plus récurrent.
- La gouvernance des protocoles de finance décentralisée deviendra un enjeu de plus en plus important, au fur et à mesure que ces protocoles et leurs communautés continueront à croître.
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